martedì 28 febbraio 2017

Angela Biancofiore - Soyons le changement "de" textes recueillis par Romano Summa, Sondes Ben Abdallah, traduction Manon Rentz.




 http://www.lorientlitteraire.com/article_details.php?cid=29&nid=6790



















 Enquête

Un souffle nouveau chez les écrivains italiens d’aujourd’hui
À l’ère de la mondialisation, un vent nouveau souffle sur l’Italie :
les écrivains italiens contemporains transforment leur propre langue littéraire et expérimentent de nouvelles formes d’écriture plus aptes à exprimer les mutations en cours. Mise au point.

Par Angela Biancofiore
2017 - 02
En pleine crise économique, écologique et humanitaire (quant à l’accueil des migrants), l’Italie – à l’instar d’autres pays méditerranéens – est plus que jamais confrontée à l’interaction entre cultures archaïques et mondialisation. La forte présence, dans la création littéraire actuelle, des mythes archaïques ainsi que des langues régionales nous révèle une Méditerranée profondément attachée à la connaissance de ses propres origines culturelles sans pour autant être repliée sur un passé révolu. Les écrivains contemporains puisent dans les cultures régionales l’énergie nécessaire pour s’ouvrir au monde, à l’échelle planétaire : ce sont les « anticorps face à une mondialisation qui tend progressivement à effacer les différences » (les ouvrages de Erri De Luca, Marcello Fois, Michela Murgia, Carmine Abate, Cosimo Argentina, Anselmo Botte vont dans ce sens). 

Interculturalité
 
Les écrivains italiens sont parfaitement conscients qu’on ne peut vivre dans un monde globalisé sans de profondes et solides racines, non pas pour alimenter le culte de l’« identité », mais au contraire pour mieux vivre au sein d’une planète où règnent des relations d’interdépendance. Par conséquent, afin de mieux comprendre la situation actuelle, il est nécessaire d’aborder toute question dans une dimension qui va bien au-delà des frontières de la nation : l’ouvrage d’Alessandro Leogrande, La Frontiera (Feltrinelli, 2015), nous invite à voir l’Italie, et en particulier Lampedusa, à travers les yeux des réfugiés de l’Erythrée. Leogrande nous apprend à regarder profondément pour rechercher les racines des problèmes actuels loin de l’Italie, en Afrique ou en Asie, là où des conflits politiques, militaires, religieux créent des êtres humains « sans terre ». Des êtres coupés de leurs racines, de leurs familles, de leurs cultures qui traversent la Méditerranée ; ces hommes et ces femmes interrogent une Italie qui a été longtemps pays d’émigration. Par ailleurs, dans le roman d’Evelina Santangelo, Senzaterra (Einaudi, 2008), un clandestin et un jeune Sicilien se rencontrent ; pour raconter cette histoire, la langue littéraire se transforme, accueillant à la fois des expressions en langue régionale (le sicilien) et les sourates du Coran. Cela nous conduit à penser que la « nouvelle langue littéraire italienne sera radicalement interculturelle », car un processus de « créolisation des langues et des cultures » se révèle nécessaire pour bâtir une société nouvelle où l’appartenance à une minorité ne serait plus la marque d’une « citoyenneté mineure ». 

En effet, une nouvelle littérature « italophone » se développe depuis quelques années en Italie qui fait désormais partie intégrante de la littérature italienne. Parmi les auteurs ayant choisi l’italien comme langue d’écriture, citons : Laila Wadia, d’origine indienne, et Christiana De Caldas Brito, d’origine brésilienne. 




Foto di Chiara Amato



L’impact de la mondialisation

 

L’impact de la mondialisation sur notre planète occupe une place centrale dans l’écriture de Erri De Luca : « Nous sommes tous sans terre, y compris celui qui possède un petit terrain bien inscrit à son nom dans un cadastre. » L’écriture devient le terrain d’une action qui vise à comprendre et à lutter contre une mondialisation qui tend à effacer les différentes formes d’humanité.



Chez d’autres auteurs, le call center (le « centre d’appel » où les marchandises sont vendues par des téléopérateurs), devient le lieu symbolique par excellence d’une société qui crée des besoins artificiels car elle est fondée sur la surconsommation et l’hyperproduction (voir Michela Murgia, Il mondo deve sapere, éd. ISBN, 2006 ; Ascanio Celestini, Lotta di classe, Einaudi 2009 ; Giorgio Falco, Pausa caffé, Sironi, 2004). Les écrivains sont souvent eux-mêmes des travailleurs intérimaires qui arrivent à exprimer, à travers leurs ouvrages, le sentiment d’une précarité qui va bien au-delà des conditions de travail (voir par exemple Andrea Bajani et Michela Murgia). 

Dans ce contexte en pleine mutation, « le genre littéraire capable de s’adapter à l’évolution des mots et des choses, c’est bien le roman » qui actuellement en Italie est en mesure d’accueillir des formes aussi diverses que le témoignage, le journal, ou l’entretien. Au sein de la parole littéraire, font irruption le « langage de l’entreprise », les expressions en anglais, le langage publicitaire et informatique. Une langue littéraire hybride voit le jour, ayant une syntaxe simplifiée qui n’est pas sans rappeler le langage des blogs et des réseaux sociaux. L’ouvrage Generazione mille euro (Rizzoli, 2006) d’Antonio Incorvaia et Alessandro Rimassa a été d’abord proposé en téléchargement (23000 en un an) créant un phénomène littéraire : le reality book. Les auteurs entendent ainsi agir sur la réalité, empruntant des formes nouvelles, comme le blog, l’autofiction, le témoignage (http://www.generazione1000.com). 



Au sein du panorama de la littérature italienne contemporaine, les nouveaux auteurs se distinguent par leur capacité d’écoute. Comme le disait Antonio Tabucchi, l’écrivain est à la fois « une antenne qui reçoit et qui transmet : il sait prendre soin des histoires des autres et les restitue à travers l’écriture ». À ce propos, on pourrait évoquer l’histoire d’Andrea Bajani, parti en Roumanie pour observer les Italiens qui délocalisent leurs entreprises, les nouveaux riches du Far East qui se comportent comme des colons sans aucun respect envers les populations locales (Se consideri le colpe, Einaudi, 2007, Si tu retiens les fautes, Gallimard, 2009). D’autres auteurs se sont engagés dans cette voie où la littérature, d’une certaine manière, côtoie l’anthropologie : Anselmo Botte qui, dans ses romans, a donné la parole aux migrants afin de révéler leurs conditions de vie et de travail dans le sud de l’Italie (Mannaggia la miserìa, Ediesse, 2009 et Grazie mila, Ediesse, 2010) ; Aldo Nove (Mi chiamo Roberta ho quarant’anni guadagno 250 euro al mese, Einaudi, 2006) qui mène une enquête auprès des travailleurs précaires conscients de la perte de leur dignité ; Carmen Covito, qui a su exprimer le « malaise des mères qui travaillent », progressivement marginalisées au sein des entreprises, en dépit de toute législation en vigueur (Temps partiel, dans l’anthologie Soyons le changement…). 


BIBLIOGRAPHIE

Soyons le changement  "de". , Nouvelles tendances dans la littérature italienne contemporaine sous la direction d’Angela Biancofiore textes recueillis par Romano Summa, Sondes Ben Abdallah, traduction Manon Rentz. , éditions Levant & Euromédia, 2016, 214 p.








Nessun commento:

Posta un commento